Pour tous ceux qui rêvent de chaleur brûlante et de princesses d'ailleurs. Ceux qui rêvent à une couronne d'or et de lapis-lazuli. Voici de quoi attendre l'été.

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Ses noirs cheveux de jais retombent lourdement, comme de soyeuses plumes de corbeau, autour de son visage digne, presque hautain, mangé par deux grands yeux noirs, tirés du plus profond des abysses, jaugeant le peuple soumis, rampant. On dit que les yeux sont le reflet de l'âme et son âme devait être bien sombre. Mélancolique, lugubre, macabre. Ces yeux là contemplent le monde avec une tristesse teintée d'arrogance, passant sans s'arrêter sur les crânes luisants au soleil de ses fidèles sujets,  et les beaux atours des riches fonctionnaires qui l'entourent.

Elle est belle.

Le lin immaculé de sa robe fine décorée avec le plus grand soin, simple et resplendissante en même temps, arrangée sur sa peau tannée par le soleil malgré le temps qu'elle passe désormais à l'intérieur de son palais, enfermée dans ses appartements comme une vulgaire prisonnière, enserre sa taille fine. Une reine ne peut pas se permettre d'avoir des rondeurs, de ne pas être parfaite. La robe le lui rappelle, l'étouffant presque par moment, l'empêchant de respirer dans l'air sec et brûlant du désert. Des éclats d'or partout sur le tissu blanc se reflètent dans la lumière crue du soleil, semblables au sable doré qui vole et tourbillonne dans la brise chaude.

Elle est belle.

Bien droite sous le poids écrasant de la couronne d'or et de lapis-lazuli qu'on a délicatement posé sur sa tête et qui l'empêche de simplement tourner la tête, elle est la reine. Debout face à son peuple adorateur, ange noble, immense statue du pouvoir, immobile et rayonnante. Princesse, reine, déesse. Et le peuple se prosterne jour après jour devant sa beauté sans savoir d'elle autre chose que son nom.

Ses cheveux virevoltent, deviennent corolle sombre, éventail de plumes noirs, linceul macabre dans lequel s'enfonce son visage devenu pâle, un éclat d'étonnement dans ses grands yeux couleur d'abysse. Pas de peur, seulement un dernier point d'interrogation laissé en suspens. Son expression reste la même. Qu'elle est noble ! De toute façon, qui donc pourrait voir l'appel de détresse déchirant enfermé dans ce carcan trop étriqué qui l'enserre, l'entoure de lin, d'or et de lapis-lazuli ? La couronne glisse alors que la tête se renverse en arrière. Éclats dorés et bleus semés aux quatre vents sue le sol dallé du palais. L'or se mêle au sable et disparait dans le vent. La robe se soulève en une aura immaculée, formant les ailes d'un ange.

Elle est belle.

Trois gouttes rubis sur le sol du palais. Le monde continue de tourner, dans un silence assourdissant. Une reine d’Égypte est tombée. Et le vent qui emmène le sable et l'or loin de ce pays étrange, de ce désert brulant, emporte avec lui sa dernière question, qu'il hurle dans le ciel bleu.

La reine est morte. Mais qui était elle ?

Dommage, personne ne comprend le langage du vent.