• Ce n'est pas dans mes habitudes que de rendre hommage aux autres. J'aime à me dissimuler derrière mon masque d'asociale torturée. Mais au fond de moi, je sais bien que ce ne sont pas les autres que j'excècre, mais leur façon de penser, leur bêtise exaspérante. Et puis un jour, j'ai trouvé quelqu'un qui n'était pas comme les autres. J'aurais bien dit un peu comme moi, mais ce serait vantardise.

    Elle était écrivain sans l'être, rose noire tachée de sang. Cristal glacé qui renferme la brume. Conversation après conversation, j'ai appris à mettre un nom sur les mots, une personnalité sur la réthorique. Moi qui croyait devoir rester à distance pour ne pas me rendre compte que tout n'était que rêve, j'ai appris que le charme était réalité. J'avais trouvé la part de moi même que j'aurais toujours voulu être. La lune rayonnante dans la nuit noire. Et malgré la peur, le mal être, le désespoir, je savais que quelque part, derrière un écran d'ordinateur, quelqu'un saurait me rendre un semblant de sourire.

    Je n'aime pas rendre hommage aux gens mais certains en ont bien besoin et aujourd'hui c'est à une perle de sang que je crie mon chagrin. 

    Bon anniversaire à la rose noire qui dans un coin se tapit sans trop croire.


    4 commentaires
  • L'homme s'approcha lentement, espérant ne pas faire de bruits malgré les tessons de verre qui jonchaient le sol sale et boueux de la ruelle. Derrière lui passa un chat. Mais lui ne faisait pas vraiment attention à ses pattes. Il ripa donc sur un morceau de verre dépoli et un vif miaulement d'indignation et de douleur s'éleva dans l'atmosphère pesante de cette chaude nuit d'été, troublant son silence tandis que l'animal filait, détalait, et disparaissait dans l'ombre. 

    L'homme y vit là un signal, sortit de sa sombre cachette et déboucha sur l'avenue déserte. Les lampadaires révélaient par leur lumière blafarde et tremblotante son visage fermé et dur. Pourtant il n'avait rien d'un criminel, il ressemblait plus à cette personne que tout le monde connait sans jamais vraiment lui parler, avec ces traits tellement banals que personne ne pourrait les décrire précisément.

    Il resta là quelques instants à peine, le temps d'éliminer le moindre doute qui aurait pu le faire hésiter sur ses sombres desseins. Et enfin il l'aperçut de l'autre côté de l'avenue, seule. A cette heure tardive de la nuit, il n'y avait d'ailleurs personne d'autre dehors. Il traversa donc, impassible.

    Elle semblait passablement éméchée, le visage rougi par l'alcool, ses cheveux roux en bataille qui lui donnaient l'air d'un félin, chaussures à la main et pieds nus sur le goudron. Enfin, leurs yeux se rencontrèrent, ceux noirs de l'homme dans ceux émeraude de la femme. Elle parut le reconnaître, un éclat de malice traversant ses yeux troubles et vides.

    Mais il était déjà trop tard car l'homme avait levé le bras, lentement, impassible, arme au poing. Et avant qu'elle n'ait pu réaliser ce qui se passait, qu'elle ait essayé de le supplier, il avait appuyé sur la détente, sachant pertinemment qu'il n'aurait jamais pu tirer si jamais il avait entendu le son de sa voix cristalline résonner dans ses oreilles. 

    La balle partit, étoile filante, pour aller se loger dans le sein de cette femme, disparaissant dans sa chair et créant ainsi un nouvel astre de sang. Elle garda ses yeux plantés dans les siens, ouvrit la bouche pour hurler mais seule sortit une gerbe pourpre de sang alors qu'elle tombait à genoux avant de s'affaler totalement sur le goudron, livide, son regard mort rivé vers les étoiles.

    Et lui disparut dans la nuit.
     

     

     


    6 commentaires


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique